Touristes, si vous saviez...
JE PARS À LA RENCONTRE

Les Ibans au coeur de Bornéo

IBANS © Gérard Blanc

Certains hommes vivent encore au rythme des saisons, des dons de la nature et des traditions ancestrales. Ainsi sont les Ibans, au fond de la jungle de la Malaisie de Bornéo.

Quoi de plus enrichissant, de dépaysant et de réconfortant à la fois que de vivre une aventure presque intime, en découvrant la communauté Iban, dans la partie malaise de Bornéo? On se sent alors vivre un de ces moments privilégiés qu’aucune publicité tapageuse ne peut vous ravir. Un jour, peut être, ce genre de rencontre, pour l’instant triées sur le volet, deviendra monnaie courante. S’il ne veut pas faire des Ibans des bêtes curieuses, le gouvernement malais devra alors développer les espaces de démonstrations folkloriques destinés au tourisme. On en trouve déjà aux environs de Kuching. Mais pour l’instant, la découverte des «longhouses » destinée aux individualistes ou pour de très petits groupes, reste encore possible et le demeurera tant que le respect des communautés visitées restera une priorité.

Carnet de route: A 60 km en voiture de Kuching, capitale du Sarawak, la ville de Sibu est comme un portail entre la civilisation et l’entrée dans le monde rural du Sarawak, là où les Chinois avaient, dans le temps, implanté leur force commerciale, après une tentative de domination politique avortée. Ce carrefour ethnique et son marché coloré sont aussi le lieu de rencontre des premières communautés Ibans qui, jadis, peuplaient toute la région. C’est à cet endroit que le 4X4 devant nous conduire vers la jungle de Bornéo prend la route du nord-est jusqu’au barrage hydroélectrique de Batang Ai, en bordure du parc national du même nom. Nous chargeons alors nos bagages dans une pirogue appelée «longboat», qui, malgré sa structure traditionnelle, n’en est pas moins propulsée par un moteur hors-bord, même si les batelières manient de temps à autre des perches en bois, bien utiles pour écarter les troncs d’arbres morts ou les rochers qui peuvent endommager la coque. Ce sont environ deux heures de navigation, au centre d’un mur de végétation luxuriante, sur l’eau de la retenue lacustre de Batang Ai, puis le long des rivières Ai et Delok, qui nous mènent jusqu’au petit port de pirogues du lieu-dit Ula Ai à Nanga Sumpa. Ce périple haut en couleur est agrémenté de spectacles tels qu’une entrée dans les forêts d’arbres morts inondés et de troncs flottants ou des visions hallucinantes de clairières calcinées, défrichage coutumier pour y implanter des rizières. Puis, la remontée du cours d’eau se fait de plus en plus périlleuse. Par moment, la pirogue racle le fond peu profond de la rivière et craque d’une manière inquiétante pour lies néophytes que nous sommes qui craignent pour la survie de l’embarcation.
Imperturbables, de gravière en gravière et de pool en pool, bateliers et batelières pèsent de tout leur poids sur leurs perches ou quittent la pirogue pour la pousser de quelques mètres jusqu’à des fonds plus cléments. L’avancée sous la voute arborescente tropicale est l’occasion de bien des rencontres tels, ici une nuée d’enfants et de femmes joyeux s’adonnant au plaisir de la baignade, ou là, des jeunes pêcheurs utilisant le fusil-harpon ou le filet pour réunir quelques tanches ou carpes qui composeront la prochaine grillade. Barrage! Les rochers émergeants ne permettent plus aux pirogues de passer. L’ensemble des bagages et autres marchandises ainsi que les voyageurs doivent être transvasés vers une autre embarcation. Le «longboat» d’origine doit être amarré pour attendre une autre équipée venant en sens inverse. Par endroit, des maisons sur pilotis aux toits de tôle ondulée émergent d’un fourré. Ce sont les petites sœurs des fameuses «longhouse» dont nous allons connaître un spécimen. Enfin, le «longboat» arrive à un petit débarcadère d’où une échelle nous permet d’accéder à la «longhouse» de Ulu Ai, but final de notre périple.

IBANS © Gérard Blanc

Chez les Ibans: La visite d’une «longhouse» est une fantastique découverte pour qui sait l’apprécier. Le fait d’habiter dans le même environnement permet de s’imprégner de la vie courante du village. Ce sont les bruits de la forêt, nuit et jour, ainsi que ceux de la basse-court (les coqs sont très matinaux), les aboiements des chiens ou le grognement des cochons mi-sauvages.
Dehors, c’est la vie courante des hommes partant à la chasse, des enfants qui, lorsque ce n’est pas la période scolaire, batifolent déjà dans la rivière et des femmes soignant les animaux. Les visiteurs, passeront la journée avec les pêcheurs au fil de l’eau, à la recherche d’une cascade pour une baignade divinement rafraîchissante, ou à la pêche au filet pour attraper la base du pique-nique de midi qui sera additionné d’épinards sauvages, de longs haricots verts et de riz cuit à l’étuvée dans les sections de bambous placées sous la cendre. Le moment inoubliable sera la rencontre du soir avec les familles résidentes de la «longhouse». C’est là où un véritable contact s’établira alors avec les diverses familles qui proposeront l’incontournable verre de vin de riz de l’amitié. Un guide iban patenté traduira les échanges de points de vues sur les aspects philosophiques de la vie courante. On découvrira alors ce paradoxe d’une communauté
vivant de chasse, de pêche, de traditions et de superstitions ancestrales, mais ne négligeant pas non plus le hit-parade de la musique pop et les vedettes du football, comme le témoignent les découpages des revues punaisées sur les portes  des maisons familiales. 15 portes donnent sur un long couloir pour quinze appartements occupés par des familles d’Ibans, du chef de village au shaman, sorte de sorcier. Chaque appartement est d’une structure rudimentaire et, bien que pouvant accueillir parfois jusqu’à 15 personnes, reste immanquablement identique aux autres, avec le coin cuisine et la salle commune. Dehors, les enfants s’adonnent à ce jeu qui a monnaie courante en Malaisie: le sepak takraw. Il consiste à maintenir le plus longtemps possible en l’air une balle en rotin par-dessus un filet de volley avec n’importe  quelle partie du corps sauf les mains.
De retour vers la civilisation, on ne peut s’empêcher de se demander si le vrai sens de la vie n’est pas justement à Nanga Sumpa.

Gérard Blanc et Erika Bodmer

Infos pratiques

Vol

Genève-Francfort avec Lufthansa et Francort Kuala-Lumpur-Kushin avec Malaysia Airlines ou bien via Amsterdam avec KLM ou encore via Londres avec British Airways, et la suite avec Malaysia Airlines.

Change

1 franc suisse = 0.303 ringgits.

A prendre avec soi

lotions anti-moustiques, vêtements légers et confortables, chaussures de marche légères et pouvant aller dans l’eau, lampe torche, sacs en plastique pour protéger les appareils photos et garder les vêtements au sec, tongs, papier de toilette, poncho ou K-way.

Erika et Gérard Blanc

Agrandir le plan

Share

Laisser un commentaire


huit + = dix

Inscrivez-vous ici pour recevoir notre newsletter